Cheb Mami au Festival de Hammamet : maitrise parfaite de la scène et du chant en toute simplicité

Les féministes, hommes et femmes, n'aiment pas Cheb Mami, c'est peut-être sûr. Or, un spectacle artistique ne peut pas se transformer en un procès politique. Autrement dit, le paradigme que "tout est politique" est très dangereux dans le champ de l'art et n'est pas du tout rationnel même s'il apparaît comme tel. C'est ce qui fait, en partie, que les tracas privés de cet artiste sont très recherchés par certains médias qui courent derrière le buzz et les petites confidences. Et c'est ce qui fait aussi que Mami n'a pas programmé un point de presse après le spectacle, car il sait, sans doute, que les questions vont être loin de l'art qu'il présente.

Cheb Mami, 8 août au Festival de Hammamet. Crédit photo : culturetunisie.com

Mais ce qui compte le plus dans le parcours artistique de Cheb Mami, c'est bel et bien sa capacité à laisser une empreinte dans le monde du chant et de la musique. Lui qui a fait des collaborations internationales précieuses : avec Sting, avec Zucchero et plus récemment avec Soolking.

C'est dans cette distinction et séparation entre la vie privée de l'artiste, tout au moins sulfureuse, et sa vie professionnelle en tant que maître de la scène, du chant et même de la musique, que les amateurs de Cheb Mami ont pu savourer le 8 août 2025 une performance exquise de mélodies ayant fait l'aura de cette star du Maghreb surtout dans les années 90 et 2000.

Petit extrait du spectacle. Crédit vidéo : culturetunisie.com

Cheb Mami, hier, à la soirée de Hammamet, après une longue absence, notamment de 11 ans sur la scène tunisienne, a régalé son assistance et a été en symbiose avec son public à qui il a proposé des chansons comme "Omri ma thanit el denia hakda", "Fatna", "Tzaza Katri", "El boulicia" et même une chanson de Ahmed Hamza très adulé en Algérie, à savoir "Jari ya Hamouda".

Il faut dire que les spectateurs aiment l'esprit algérien, son romantisme. Ils se bousculaient pour trouver une place stratégique afin de voir de près la performance envoûtante de leur idole : Cheb Mami. En ce sens, la scène de Hammamet hier a pris plus que sa capacité réelle en termes d'accueil des amateurs de l'art vivant. Les places étaient donc très chères et presque rares. Certains n'ont pas pu voir le spectacle tellement il y avait de l'affluence.

Ambiance de folie lors du concert du "Prince du Raï", extrait de "Fatma". Crédit vidéo : Brahim Hammami

Il a été accompagné par une équipe de musiciens sublime et qui excelle dans le maniement des instruments. La voix de Mami est bien meilleure en live qu'en studio. Malgré l'âge et les péripéties de la vie, ce chanteur algérien, mais international, n'a pas perdu l'énergie et la beauté de sa voix. Il a une technicité d'exécution que l'on voit rarement aujourd'hui en live. Sa voix est un magnifique instrument, elle dépasse même celui-ci.

Ce grand artiste est capable de chanter plusieurs rythmiques et change de mode musical de manière très fluide et en toute simplicité. Beaucoup des assistants à son concert disent qu'ils ont été "emportés par une soirée inoubliable".

Le concert de Hamammet de Cheb Mami a condensé, en réalité, plus de 40 ans de musique. Et il a révélé que les belles paroles et les mélodies bien travaillées sont ce qui fait vivre l'art du Raï à travers le temps.

Ambiance de folie lors du concert du "Prince du Raï". Crédit vidéo : Brahim Hammami

Cheb Mami ainsi n'est pas venu avec un DJ et une table de mixage, mais comme dans les années 90, il a embelli la scène avec toute son équipe et tous les instruments. C'est un artiste qui a le trac de la scène et veut donner le meilleur de lui-même. Il respecte véritablement son art avant tout et les gens qui sont venus le voir s’exprimer sensiblement sur l’arène de Hammamet.

Ses morceaux sont des paroles pures et des phrases musicales pleines de créativité, loin du bruit du Raï de l'époque actuelle qui n'arrive pas à produire une vraie musique.

Cheb Mami a donc chanté des pièces qui dépassent le temps actuel et l'âge de la plupart du public présent, et malgré ceci, toute l’assistance, disposée en forme de coquillage, a chanté avec lui.

Cette année, au final, la 59ᵉ édition de Hammamet a donné de la place à l'expression artistique algérienne et c'est une très bonne chose et le public en demande davantage.

Mohamed Ali Elhaou