La pièce "9" de Moez Gdiri : tunnel de la mort et lueur de l'espoir

Les amateurs du 4ᵉ art ont pu voir le 12 décembre 2025 et aussi demain vers 19 h 00 la pièce "9" du metteur en scène et dramaturge Moez Gdiri à l'espace culturel Le Rio situé au 92 rue Radhia Haddad à Tunis. Cette nouvelle représentation s'inscrit dans la continuité de sa pièce "11-14", encore en tournée également.

"9" est classable dans le théâtre expérimental, c'est-à-dire qu'elle met le public face à une situation, l'interroge, le déstabilise, le dérange, par le biais de la mise en scène et aussi le texte qui montrent la perplexité, le déchirement et la faiblesse de l'être face à cette vérité.

Durant une heure, les trois comédiens dans la pièce se sont sincèrement dépensés face à un sujet très épineux : l'expérience palpable de la mort.

Meriem Ben Hamida, Haithem Moumni et Marwen Missaoui dans la pièce "9" de Moez Gdiri le 12 décembre 2025 . Crédit photo : culturetunisie.com

La pièce "9" est ainsi une mise en situation traitant un sujet le plus souvent tu dans l'espace public. En effet, progressivement la civilisation moderne, l'individu et tout ce qui l'entoure essayent d'exclure ce passage obligé qu'est la mort, marquant la fin de la vie.

La pièce "9" appréhende donc la mort en apportant une approche croyante qui fait voir symboliquement qu'il y a une autre vie après la mort. Elle invite clairement à ne pas avoir peur d'elle et à ne pas tenter de la reporter.

Faut-il rappeler que d'autres metteurs en scène, citons les dramaturges majeurs, ont traité de la mort autrement, comme un néant absolu : Samuel Beckett, Arthur Adamov, Eugène Ionesco et Jean Genet.

"Pourquoi la peur, quand il s'agit de faire face à un événement certes soudain, mais tout à fait paisible", tel est un des messages de cette œuvre "9". Celle-ci dit que l'expérimentation de la mort est la libération absolue et la délivrance finale de cette vie matérielle qui n'engendre que souffrances, violences et déshumanisations.

Sur scène, il y a deux principaux personnages anonymes et symboliques qui dénotent la psyché de chacun de nous. Une partie de cette psyché essaye d'oublier, de reporter cette mort en la fuyant toujours tandis qu' une autre partie invite au courage et à faire cette expérience obligée.

Le troisième personnage de "9" est incarné par la formidable actrice Meriem Ben Hamida qui partage la planche avec jouant deux comédiens de talent et très rodés au monde du théâtre, à savoir Haithem Moumni et Marwen Missaoui.

Sur le plan de l'esthétique du jeu de ces trois comédiens, le spectateur peut tout à fait légitimement se rappeler, à certains instants, de la pièce Jounoun de Fadhel Jaibi que culturetunisie.com a vue sur la scène du théâtre de Carthage, durant l'été de 2002.

Le point fort de cette pièce demeure, sans doute, dans sa vraie recherche sur le son, la sonorité et même la vocalité de la parole de chacun des trois protagonistes.

Ces différentes sonorités rythment en harmonie la pièce "9", au même titre que la lumière, sont mises au service de cette expérimentation dans laquelle Moez Gdiri embarque le public présent.

La troisième partie de cette fresque théâtrale augure certainement de l'optimisme puisqu'une lumière est perceptible au bout de ce tunnel sombre, d'où le titre de la pièce "9", qui symbolise le passage passage d'un monde à un autre, le renouveau et la métamorphose.

Pièce "9" à voir, car par le biais d'une scénographie nue, des comédiens dont le spectateur voit à peine le visage donnant de dos au public à plusieurs moments, Moez Gdiri a montré encore une fois qu'on peut faire une représentation théâtrale et faire vivre à son audience un 'moment dramatique' avec toute la signification que ce syntagme comporte.

Mohamed Ali Elhaou

Remarque : cliquez sur les mots bleus dans ce texte pour connaître un peu les références qui ont servies à l'écriture de cet article.