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  • Mohamed Ali Elhaou

Ghinwa Ben Tara, Eya Daghnouj, Chahrazed Helal à la 40ᵉ édition du festival de la Médina : le talent et les belles présences ne suffisent plus

Au sein de la salle du théâtre des régions à la cité de la culture de Tunis, le mercredi 3 avril 2024, les passionnés des belles voix avaient rendez-vous avec de la musique substantielle choisie par l’équipe organisatrice du festival de la Médina dans sa 40ᵉ édition. Cette manifestation culturelle a sincèrement atteint l’âge de la maturité et reste inégalée ; même si on remarque d’autres festivals pullulants par-ci et par-là à cette même période ramadanesque à Tunis ; comme ailleurs tels que : à Bizerte, à Sousse, à Gabes, à Nabeul, etc.


Hédi Mouhli, président de la 40ᵉ édition du festival de la Médina


Au début du spectacle, le vétéran de l’organisation du monde de la culture et de l’art Hédi Mouhli avait fait un mot pour situer ce festival comme une pierre angulaire et un pilier de la scène du spectacle dans notre pays. Il a insisté sur le fait que ce spectacle est tout d’abord un appel à stopper la domination aveugle qu’est en train de s’abattre sur les Palestiniens. En même temps, il a rappelé que ce festival se positionne comme une plateforme importante pour faire connaitre, entre autres, les belles voix de notre pays ; lesquelles attendent souvent le moment opportun pour être valorisées pour ce qu’elles sont. Hédi Mouhli, dans la même foulée, a présenté les trois cantatrices confirmées. Elles vont être esthétiquement mobilisées dans un style musical engagé.  Les trois chanteuses ainsi que la troupe Musiqat étaient sous la baguette magique de Naoufel Ben Aissa. Celui-ci séduit par sa vaste connaissance de la musique, mais aussi par son sourire et sa simplicité dans le fait d’être avec son équipe musicale. Le spectacle a été organisé à la minute près avec une préparation minutieuse des textes choisis pour la soirée.


Naoufel Ben Aissa et sa troupe Musiqat


Au commencement, Ghinwa Ben Tara


La ravissante chanteuse Ghinwa Ben Tara a commencé par le morceau Nella Fantasia composé par Ennio Morricone pour le film The Mission réalisé en 1986 par Roland Joffé. Film sorti en salle la même année. Son scénariste est Robert Bolt. Le film est composé du trio d’acteurs mythiques : Robert De Niro, Jeremy Irons et Ray McAnaly.


Les notes du piano accompagnant le morceau Nella Fantasia, lors de ce spectacle dédié aux péripéties du peuple palestinien, sont sublimes et la voix de Ghinwa Ben Tara est réellement angélique : une franche découverte de ce spectacle. Par la suite, elle a chanté des morceaux de la diva Fairouz sur la ville de Jérusalem. Les répertoires dans ce concert rappellent ceux joués lors du festival de la chanson tunisienne dans lequel nous avons détaillé les pièces présentées.

En effet, le morceau Nella Fantasia, un chef-d’œuvre, dans le monde de la musique, a parfaitement collé aux capacités vocales et scéniques de notre cantatrice Ghinwa Ben Tara ; très peu connue par le grand public.  


Ghinwa Ben Tara, lors de ce même spectacle


En plus de la belle mélodie et de la très sensible interprétation de cette pièce, les paroles de cette œuvre appellent à un monde plus juste dans lequel il y aura de la place pour la générosité et pour des relations saines entre individus et groupes sociaux sans calcul, marquées par le don et désintéressées. Les paroles de ce chef-œuvre viennent comme suit :


Nella fantasia io vedo un mondo giusto.

Lì tutti vivono in pace e in onestà.

Io sogno d'anime che sono sempre libere,

Come le nuvole che volano,

Pien d'umanità in fondo all'anima.


Nella fantasia io vedo un mondo chiaro.

Lì anche la notte è meno oscura.

Io sogno d'anime che sono sempre libere,

Come le nuvole che volano,Pien d'umanità.


Nella fantasia esiste un vento caldo,

Che soffia sulle città, come amico.

Io sogno d'anime che sono sempre libere,

Come le nuvole che volano,

Pien d'umanità in fondo all'anima.

 

Traduction :


Dans mon rêve, je vois un monde juste.

 Tout le monde y vit dans la paix et l'honnêteté.

 Je songe d'âmes toujours libres,

 Comme des nuages dans le ciel,

 Pleines de générosité au fond de l'âme.

 

Dans mon rêve, je vois un monde clair.

 Même la nuit y est moins sombre.

 Je songe d'âmes toujours libres,

 Comme des nuages dans le ciel,

 Pleines d'humanité.

 

Dans mon rêve, il y a un vent doux,

 Qui souffle sur les villes, comme un ami.

 Je songe d'âmes toujours libres,

 Comme les nuages dans le ciel,

 Pleines de générosité au fond de l'âme.


Cette sensation de liberté et de justice qu’il y a dans le texte a été encore une fois bien véhiculée et transmise par cette brillante chanteuse Ghinwa Ben Tara qui excelle dans la musique occidentale.


Eya Daghnouj : la facilité de l’interprétation


Sur la même longueur d’onde de Ghinwa Ben Tara, Eya Daghnouj a chanté également un répertoire engagé, notamment des deux chanteuses libanaises Julia Boutros et de Fairouz. Elle a surtout atteint le summum de la créativité lors de son interprétation de la chanson tunisienne Oktob Ismek Ya Bladi de Nawel Ghachem. Cette chanson est gravée à jamais dans la mémoire collective des différents publics de notre pays.


Eya Daghnouj lors de ce spectacle dédié au peuple palestinien


Lors de cette chanson, l’excellente Eya Daghnouj a fait preuve d'une force vocale, d'une présence admirable sur scène et d'une interprétation aisée d’un morceau contenant plusieurs modes musicaux et se composant de différents changements de rythme. Par la suite, elle a interprété des morceaux populaires palestiniens. 


Chahrazed Helal, terminer en beauté


Au-delà du répertoire de la musique engagée chantée, encore une fois, de Faizouz, Chahrazed Helal a su nous rappeler par son interprétation de Tir El Hammem Majrouh d'Amina Fakhet les multiples palettes que contient sa voix et sa sensibilité dans l’interprétation. Aussi, elle a montré une savante technicité lorsqu'elle a joué la chanson Ya Thouar El Arth de Julia Boutros.



En revanche, on a l’impression que parfois Chahrazed Helal lui manque un peu de jus, de vigueur, de force au niveau de la voix pour atteindre le stade d’une interprétation marquant les esprits comme celle faite par Amina Fakhet surtout dans les années 90. Peut-être qu’il lui manque aussi un peu de folie créatrice dans l’interprétation ?


Chahrazed Helal, mercredi 3 avril 2024


Tout compte fait, les trois cantatrices ont prouvé une satisfaisante technicité musicale et une bonne présence sur scène. Ce qui leur manque, toutefois, c’est un répertoire neuf à travers lequel elles pourront davantage susciter l’intérêt du public. Certes, elles ont tout ce qu’il faut pour mener une belle carrière nationale, voire arabe, mais le seul bémol au vu du spectacle : c’est le manque de travail neuf, d’originalité, d’expression inédite pour ce spectacle afin de justifier que la chanson et la musique traditionnelles sont encore vivantes dans notre pays. Cet art qui coûte de plus en plus cher et demande investissement en termes de temps, d’argent et de réflexion semble de plus en plus délaissé pour des tentatives de réinterprétations, sous forme de cover ou de medley, de morceaux anciens, locaux et arabes. À certain moment, le public ne pourrait plus avaler ceci, s’enlace, même si la cause demeure noble.

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