Najla Ben Abdallah et Mohamed Dahech dans "10 ans de mariage" : du bon et de l'améliorable
- Mohamed Ali Elhaou
- 25 août
- 4 min de lecture
Dernière mise à jour : 4 sept.
Les amateurs du théâtre, en été, avaient rendez-vous, dimanche 24 août, à l'Espace de spectacle à Dar Sebastien à Hammamet avec la pièce "10 ans de mariage", spectacle en tournée depuis décembre 2024. Deux personnages principaux occupent les planches de ce théâtre de plein air : Leila et Seif.
Ceux-ci sont incarnés respectivement par Najla Ben Abdallah et Mohamed Dahech. Cette représentation écrite en 2010 par le dramaturge belge Alil Vardar de son vrai titre "Un couple parfait... Enfin presque !", en réalité du genre vaudeville, dure presque deux heures, dans laquelle existe une vraie alchimie entre les deux comédiens au point où le spectateur s'interroge s'ils ne sont pas un vrai couple dans la vie réelle.

La pièce est mise en scène par Sana Ben Taleb et aborde une problématique épineuse dans notre société en transformation : le mariage.
Cette institution, considérée comme le premier noyau de la société, est désormais en crise et les candidats s’interrogent de plus en plus sur la façon de la préserver dans le but de construire des citoyens du futur plus ou moins équilibrés et satisfaits de leur condition de départ.
Être en couple a commencé à montrer des signes de faiblesse, de fissure et de dysfonctionnement à partir de la fin des années 80 (encore faut-il voir des recherches sociologiques plus précises sur cette question).
Depuis lors les deux sexes semblent progressivement en dissonance dans notre pays. Ainsi, les générations qui sont nées dans les années 90 et 2000 trouvent davantage de difficultés à s'entendre avec le partenaire tous les jours et dans la routine du quotidien que leur aïeux.
Cet aspect fait que les médias aujourd'hui pour compenser ce problème social, lié à une incompréhension saillante bien plus qu'auparavant, proposent plusieurs émissions de matching, Matchy, entre autres, et de coaching pour donner des recommandations afin de réussir sa vie et plus particulièrement son parcours en couple puisque c’est le plus incertain et contingent.

D'où aussi l'intérêt de cette comédie "10 ans de mariage" qui montre les rebonds et les soubresauts de cette institution du couple en choisissant une narration qui se projette sur la longue durée : elle met en visibilité plusieurs séquences dramatiques de la phase jeunesse, de la phase adulte et de la phase vieillesse.
La pièce miroite donc dans l’humour satirique et sarcastique, dans l’autodérision, des moments critiques par lesquels passe le couple. Le jeu de Najla et de Mohamed est ainsi dominé par le naturel et la bonne ambiance. La performance a été, cependant, à certains passages de la dramaturgie, piégée dans la lenteur de la séquence ou par l’exagération dans le livrable expressif.
Cela n'enlève rien que les deux comédiens sur scène ont bel et bien fait preuve d'une capacité véritable et authentique d'exécution de leur partition. Ils ont surtout réussi à tenir en haleine leur public dans une ambiance estivale qui fut par ailleurs très humide et pas très propice au théâtre.

"10 ans de mariage" fait comprendre donc que le couple se construit dans le sacrifice de la liberté de chacun. La pièce esthétiquement opte pour un message positif consistant à affirmer et à plaider que la vie à deux dans le pardon, la patience et le dépassement de l’erreur de chacun des deux protagonistes est l'unique manière de résister aux tracas de l’existence.
La mansuétude est, de fait, la clé pour faire tenir le couple selon la pièce et l’attachement à l’autre quelles que soient les circonstances. D'ailleurs, les deux personnages dans cette comédie s'accrochent l'un à l'autre jusqu'au bout malgré les velléités de voir ailleurs qui tentent chacun d'eux.
Le choix sonore de ce vaudeville s’est orienté, en outre, vers des mélodies et des chansons avec lesquelles la génération des années 80 a grandi, notamment le fameux titre Hotel California.
Au final, cette pièce peut être améliorable si certaines scènes disparaissent pour présenter une intrigue ne dépassant pas une heure et 10 minutes au maximum au lieu d'une heure 45 minutes actuellement.

Des situations comme la danse dans un pyjama répétée à deux reprises, le jeu avec un microphone, pas toujours bien réglé, ou encore l'absence d'une belle occupation de l'arène de Hammamet et sa transformation, du point de vue de la scénographie, en une boite italienne ont été les quelques points faibles du spectacle et enlèvent par conséquent un peu de magie à ce travail quand bien même sérieux.
Certainement, Najla Ben Abdallah et Mohamed Dahech, quand ils sont bien encadrés artistiquement, peuvent produire des merveilles, car les deux étaient très heureux et à l'aise sur les planches de Hammamet et leur performance a été pleine de générosité, de réalisme, d'alchimie et de maitrise.





















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