La 23ᵉ édition du festival de la chanson tunisienne : demeure encore un goût amer !
Le rideau vient de tomber sur la 23ᵉ édition de la chanson tunisienne. Ce festival s'est déroulé en quatre soirées entre le 8 et le 11 mars 2025 et a choisi pour devise "La Tunisie chante". Ce festival est, en réalité, une plateforme pour donner une visibilité aux jeunes talents qui feront le futur de la musique et de la chanson officielle de demain. Sauf que depuis sa création, le festival ne donne plus l'aura escomptée. Il devient de plus en plus pareil à ce que l'on voit dans les émissions à grandes audiences telles que Arab-Idol ou Arab got talent, entre autres.

Avec une approche esthétique démonstrative et exubérante, on cherche la mise en célébrité des nouveaux interprètes sans trouver des solutions structurelles au monde de la production de la chanson dans notre pays. Ainsi, les chanteurs et les artistes de la musique optent plus qu'avant pour le salut personnel, sans compter vraisemblablement sur les solutions collectives. Avant, par exemple, il y avait l'orchestre de la radio nationale qui assurait des productions pour les artistes. Aussi, il y avait des poètes disponibles pour faire des chansons et qui étaient des chasseurs de têtes, c'est-à-dire des capteurs de nouvelles stars.
Nous avons remplacé tout ceci, par la prolifération des festivals de tout genre, en donnant une bouffée d'oxygène, une visibilité très éphémère, à de jeunes talents, qui s'évaporera à la fin de la manifestation. La candidate ou le candidat se réfugiera, par conséquent, ou bien dans l'enseignement, car il ne trouve pas un moyen juste pour mener sa carrière d'artiste, ou bien sera dans une perspective purement commerciale dans l'animation des soirées et des fêtes de mariage. Une chose est sûre, il sera dans la perspective du mythe de Sisyphe : l'éternelle quête de la reconnaissance de son art.
En vérité, c'est bien de donner des récompenses pour les jeunes talents, comme on sait bien le faire, chaque année, en compagnie de personnages de grande renommée, mais jusqu'à quand laissera-t-on la chanson tunisienne sans moyens et sans objectifs dans un monde mondialisé misant notamment sur la technologisation de la musique et sur le culte de l'apparence ?, sans vraiment engendrer de grandes mélodies substantielles comme celles qui ont été faites par Naceur Sammoud, Samir Agrebi, Abdelkrim Shabou ou encore Mohamed Allam, pour ne citer que ceux-ci.
Il faut dire les choses clairement, le festival de la chanson tunisienne est très fragile aujourd'hui, il s'est d'ailleurs arrêté un long moment, entre 2008 et 2020. À sa naissance en 1987, il y avait un esprit de compétition. Le festival a fait connaitre au grand public des noms comme Saber Rebai, Sonia Mbarek, Slim Damak, Karim Chouayeb, Chedli Hajji et bien d'autres. Aujourd'hui, il passe presque inaperçu, sans réellement laisser une trace dans la mémoire du spectateur. C'est donc un monument et un patrimoine culturel nécessitant un ravalement. Ceci passe alors en donnant plus de moyens et en créant des structures publiques pour la création musicale avec des poètes, des interprètes et des compositeurs qui peuvent faire des productions dans des studios appartenant à l'État. Ceux-ci doivent renaitre de leur cendre et encourager la créativité, sans aucune récupération politique ou idéologique. Le cas échéant, on sera admiratif de créations passagères, sans valeur ajoutée, comme c'est le cas dans cette édition.
Très bon article qui souligne le problème actuel de production de la création tunisienne, mais qui ne souligne pas que ce marché tunisien interne est limité ; ne peut plus être autonome et rentable vu la globalisation et l'existence des verrous internes ...et que plus d'efforts devront se faire pour s'ouvrir sur le monde et valoriser notre produit musical (chansons et morceaux instrumentaux) à travers une diplomatie culturelle efficace…les moyens d'une meilleure production en interne existent, il suffit de faire comme le font la plupart des pays dont le produit culturel ravage le monde : investir dans l'infrastructure culturelle (pour multiplier les représentations) et inciter les médias privés et publics à donner plus de visibilité au produit tunisien, monétiser et…