Rana Gorgani à l’Acropolium de Carthage dans le cadre de l’octobre musical
La danse soufie est une pratique spirituelle qui engage l'âme et le corps portant le nom de Samâ. Cette danse signifie audition spirituelle en lien avec le soufisme. On connait cette danse tournante également sous le nom de "Derwishes". Celle-ci est une forme de mouvement qui permet à celui qui s'y exerce de tourner en rond durant l'écoute de la musique qui opère comme une psalmodie. Ainsi, l'Octobre musical qui s'est déroulé du 12 au 31 du même mois en 2018 a été l'occasion pour nous de rencontrer des créateurs iraniens qui tentent de renouveler cette expression ancestrale ; plus particulièrement la formidable Rana Gorgani.
Le jeudi 18 octobre 2018 à l’Acropolium de Carthage, dans le cadre de l’Octobre musical qui s'est tenu du 12 au 31 du même mois, les spectateurs étaient venus très nombreux pour assister au rendez-vous avec la danseuse iranienne soufie Rana Gorgani et le musicien Mohsen Fazeli. Leur prestation était très originale. Vêtue d'une tunique colorée, Rana Gorgani férue et spécialisée des danses du monde persan se consacre depuis 2007 à la spiritualité soufie. Cette danse selon elle a un volet universel pas assez exploité sur la scène mondiale. Dans notre interview avec elle, Rana Gorgani dit qu'elle se positionne sur cet axe et cherche de plus en plus des collaborations internationales afin de faire connaitre cet art de la scène à la fois traditionnel et très contemporain notamment en le mariant avec la performance des artistes imprégnés de différents univers musicaux recherchés et profonds. La vocation de cette artiste talentueuse, très préoccupée par l'attention à chaque détail de son spectacle, est de sortir de la reproduction de la danse très codifiée et chorégraphiée des cérémonies des derwiches tourneurs. Certes, pour l'artiste, il est question toujours de communion avec le divin, mais de façon plus légère et qui communique davantage avec l'audience venant assister à ce spectacle et qui rend cet acte artistique, par la même occasion, plus intelligible.
Cette danse selon Rana doit plus œuvrer pour une libération du corps, de l'intime et du cœur. Pour ce faire, Rana abandonne la blancheur pure de la robe de danse pour s'éloigner de la limpidité absolue ; jadis véhiculée. Sa robe est garnie par une écriture persane et même traversée par des lignes noires.
En outre, le mouvement classique circulaire de cette danse est désormais doucement accompagné par les beautés des mouvements des cheveux de la femme ; ceux-ci agissent comme des vagues infinies qui produisent un tourbillon et incitent à l'émancipation et au lâcher-prise. La prestation de Rana Gorgani lors de ce spectacle donné à l'Acropolium est à l'image d'un corps qui appelle à la vie, à la joie et à la tendresse. Ses mouvements sont telle une beauté inondée par le plaisir du rythme d'une musique éternelle. Ses gestes conduisent à l'ivresse, au battement du cœur, ravivent les souvenirs les plus secrets, font surgir le souffle, le gémissement, appellent à la méditation, à l'extase et à l'épanouissement de l'âme.
Ben Mahmoud, Ben Garbia et Bessamra